Les Nikon D800 et D800E ont plus de pixels que que mon scanner Nikon Coolscan V ED.
(Nikon D800, 36 millions de pixels: WTF ?) 🙂
La tentation était donc grande de comparer leurs performances sur une diapositive réalisée sur un film de faible sensibilité à grain fin.
Un peu d’histoire:
Avant que l’image ne se dématérialise, on utilisait des appareils 24×36 et du film argentique pour réaliser des duplis des dias que l’on souhaitait diffuser dans la presse ou mettre dans des banques d’images pour préserver les originaux de ses photos.
J’ai réalisé des milliers de duplis en argentique 24×36. L’appareil était fixé sur une colonne très stable pour éviter toute vibration au déclenchement et équipé d’un objectif macro (Micro-Nikkor Auto 1:3.5 F=55mm) et d’un bague allonge pour monter au rapport 1/1. Je plaçais mon original sur une tête couleur inversée pour pouvoir modifier la température de couleur de la source lumineuse, et j’utilisais un film spécial, du duplicating, dont le contraste était moins élevé que celui d’un film de prises de vue normal.
La difficulté était double:
Le dupli était rarement parfait du premier coup en termes de colorimétrie et on devait compenser des dérives de couleur en utilisant des filtres ou en modifiant la température de couleur de la source qui éclairait l’original;
le contraste était trop élevé si l’on utilisait un film de prises de vue normal. Pour corriger cette montée du contraste, on pouvait soit utiliser un système permettant de pratiquer une prélumination, un flashage du film en l’exposant pendant une durée très brève (pour le voiler légèrement) de façon à réduire son contraste, soit utiliser un film dédié, le duplicating, conçu pour cet usage, au contraste beaucoup moins élevé qu’un film traditionnel.
Pour être tout à fait exhaustif sur cette glorieuse époque, il faut ajouter que si l’on arrivait à d’excellents résultats en termes de colorimétrie et de contraste (encore que les Kodachromes étaient presque toujours un problème), le dupli était toujours un peu moins piqué que l’original. La première génération était acceptable, mais si l’on était obligé de réaliser des duplis de duplis, le résultat était très vite inutilisable. Pour des impressions de grande qualité, on réalisait des duplis dits Hi-Fi, beaucoup plus chers, en projetant sous l’agrandisseur la diapo sur un film duplicating au format 4×5 ”.
L’exercice était relativement compliqué, mais il faisait vivre un grand nombre de personnes…
A priori, l’adaptation de ce dispositif au numérique ne devrait présenter que des avantages vis à vis de l’argentique, car en travaillant en raw, on peut intervenir sur la balance des couleurs et sur le contraste après la reproduction.
Dans la suite de ce billet j’utiliserai le terme dupli pour différencier les images produites avec le Nikon D800 des scans réalisés avec le Coolscan. Le terme n’est pas à proprement parler approprié au processus puisque l’on transforme une image argentique en image numérique mais il a, me semble-t-il, une légitimité historique et une repro de dia n’est pas non plus à proprement parler un scan.
Le Nikon Coolscan V ED:
Le Nikon Coolscan V ED appartient à la dernière génération de scanners fabriqués par Nikon. Il est dédié aux films 24×36 noir ou couleur, inversibles ou négatifs. Il n’a pas la polyvalence des scanners à plat, mais la qualité de ses scans 24×36 leur est très supérieure. Nikon en a arrêté la fabrication, la commercialisation et la maintenance depuis un bon moment, mais ils restent une référence et ont conservé une cote tout à fait surprenante en occasion. Leur driver n’est plus mis à jour par Nikon et c’est grâce à un créateur de shareware Ed Hamrick que l’on peut continuer à l’utiliser malgré les évolutions successives des systèmes d’exploitation.
Le principal avantage en terme de productivité du Coolscan, tient à une fonction magique, le Digital Ice. Cette fonction supprime automatiquement les pétouilles et même les rayures (pas trop violentes) que l’on doit sans cela retoucher une à une dans Photoshop. (Cette technologie n’est pas utilisable avec les films noir & blanc.) Cette technologie a cependant un défaut, c’est qu’elle enlève du piqué aux scans.
J’ai donc réalisé deux scans avec le Coolscan, l’un en utilisant le Digital Ice en mode « Fine », et l’autre en désactivant cette fonction. (La diapo test est particulièrement sale après avoir trainée sur ma table lumineuse un peu trop longtemps, mais ça n’en met que mieux en évidence l’utilité de Digital Ice.)
Le Nikon D800 est en mode autofocus, parce que je fais plus confiance à son autofocus qu’à mes yeux. J’ai utilisé le Micro Nikkor 60 mm à F/8 et j’ai réalisé mes photos à sa sensibilité nominale, 100 Iso. Je suis un poil au-dessous du rapport 1/1. Comme je n’ai pas de télécommande pour le Nikon D800, pour être certain de neutraliser tout bougé, j’ai déclenché avec le retardateur et la temporisation miroir relevé (fonction d4). J’ai utilisé une table lumineuse équilibrée pour la lumière du jour (5000°K) que j’utilisais pour livrer mes photos argentiques aux clients que j’ai recouverte d’un cache noir pour éliminer toute lumière parasite.
Les crops pour comparer le piqué:
L’image recadrée pour supprimer les bords du cache fait 5379 pixels x 3540 pixels avec le scan contre 7121×4700 pixels avec le D800. J’ai redimensionné le fichier du D800 pour le ramener aux dimensions de celui du Coolscan pour pouvoir comparer les crops. Le crop du scan est donc à 100% (1 pixel écran= 1 pixel image), alors que j’ai réduit la taille en pixels de l’image du D800 pour pouvoir les comparer à la même échelle.
J’ai également utilisé le scanner avec un autre logiciel que celui qui était fourni par Nikon avec son périphérique, VueScan de Ed Hamrick que j’ai évoqué précédemment.
Le Coolscan utilisé avec le logiciel fourni par Nikon sans la fonction Digital Ice est de toute évidence en tête. Presque trop. Le piqué sur les détails est nettement supérieur, mais le grain explose (et c’est un film qui n’est pas supposé en avoir beaucoup).
Le Coolscan utilisé avec le logiciel fourni par Nikon avec la fonction Digital Ice est en queue de peloton.
Le Coolscan en utilisant VueScan et la fonction Digital Ice, le D800 et le D800E sont, me semble-t-il, dans un mouchoir de poche.
Et pour illustrer mon propos sur les limites des scanners à plat sur du 24×36, ce crop réalisé avec un Epson V750
La productivité:
Parce que j’utilise le Coolscan avec la fonction Digital Ice, en mode multipasse (pour minimiser le bruit sans perdre en piqué), j’allonge considérablement la durée de chaque scan. Il faut compter plus d’une minute par passe, là où les D800 reproduisent la dia en une fraction de seconde. Mais un chargeur (en option) permet de charger 50 dias et d’aller déjeuner en laissant le scanner faire son travail.
Par contre les duplis des D800 supposent, à moins que l’on ne soit guère exigeant, que l’on aille retoucher une à une les pétouilles dans Photoshop.
Par ailleurs, le scan est un périphérique. Il suffit de le mettre en marche pour pouvoir l’utiliser, là où avec un boîtier il faut mettre en place tout un dispositif.
La colorimétrie:
Lorsque l’on scanne une image, il y a toujours une dérive et de ce fait une interprétation de l’opérateur à moins que l’on ne se contente d’un brut de scan. J’avais essayé il y a quelques années de travailler en étalonnant mon scanner avec une charte IT8, mais j’avais renoncé assez rapidement à ce workflow, apparemment plus rigoureux, parce que cela ne m’empêchait pas de devoir retravailler mon image pour obtenir un résultat qui me convenait.
Le résultat, toujours avec le scanner, sera également différent selon le soft que l’on utilise pour scanner l’image. Tout comme d’ailleurs le dupli réalisé avec le D800 sera différent selon le logiciel de derawtisation que l’on va utiliser.
Avec cette diapo, c’est sans doute le scan réalisé avec VueScan qui est le plus proche de mon original, suivi par les duplis des D800, le scan réalisé avec le logiciel de Nikon venant en fin de peloton. Mais aucun des trois n’est la copie conforme de l’original. Alors ensuite, c’est une question de temps que l’on est prêt ou non à consacrer au post-traitement de l’image.
Bonjour,
Intéressant votre post. Je m’intéresse beaucoup à ce sujet pour les scans de films noir et blanc. La lumière directe des coolscans V ou 5000 amplifie le grain ce qui n’est optimal et créé bcp de petzouilles à traiter dans photoshop.
Avez-vous essayé la repro de negas nb avec le nikon 800e ??? Je suis très curieux de voir le résultat.
Bryan
Je n’ai plus le D800e qui ne m’avait été confié que pour quelques jours. Je réaliserai un test avec du film noir&blanc et le D800, surtout qu’en noir & blanc on ne peut utiliser la fonction Digital Ice. Mais je sais déjà :), que même si les pétouilles seront moins présentes qu’avec un coolscan, elles seront toujours là. 🙁
Merci. J’ai hâte de voir le résultat. Oui les pétouilles seront là mais si la qualité est équivalente en définition, ça devient très intéressant. Car on gagne quand même un temps de numérisation, et peut être même une planéité du film vs les passe-vues du CS 5000 qui sont juste un enfer à ajuster.
Bonjour Bryan, tenez moi au courant de votre expérience si vous vous lancez dans l’aventure. 🙂
Bonjour,
Un grand merci pour vos tests et votre article sur la reproduction des diapos.
Il m’intéresse d’autant plus que je dispose des mêmes matériels que vous.
Je m’étonne cependant que vous n’abordiez pas la question de la qualité d’éclairage.
Vous semblez satisfait d’une table lumineuse avec ses tubes 5000.
Le fait que le spectre de ces tubes soit très incomplet ne vous a-t-il jamais posé de problème dans la fidélité des couleurs et leur traitement ?
La lumière du jour est à coup sûr la plus “complète”, mais elle varie sans cesse.
L’incandescence est plus continue que la fluorescence, mais est très riche en rouges.
Meilleures que les tubes, les LED n’ont pas non plus un spectre continu.
Le flash est-il la source la plus appropriée ?
Cela dit, je ne suis pas plus royaliste que le roi. Si vous trouvez parfaite la table lumineuse, je me rangerai à votre avis…
Merci d’avance !
En l’occurrence, il s’agit d’une table normalisée qui passée au thermocolorimètre ne montre pas de trous dans le spectre. J’ai réalisé également des essais avec une tête couleur inversée qui me servait pour réaliser des duplis argentiques sur film duplicating, je n’ai pas constaté de difficultés plus importantes avec la table lumineuse. Je suppose donc que c’est une affaire de tubes, tous les tubes lumières du jour étant loin de se valoir.
De cette expérience, j’ai retiré le sentiment que la difficulté de l’exercice ce n’était pas la reproduction des couleurs mais la maîtrise du contraste au travers du développement du fichier Raw.
Par ailleurs, je ne suis pas passé en production après avoir testé le protocole (je dispose de scanners). Je ne sais donc pas si les réglages trouvés pour une dia ne doivent être modifiés qu’à la marge lorsque l’on change de film (comme en argentique) ou si c’est un travail qui peut devenir important. (Je suppose que comme en argentique, le Kodachrome suppose des réglages très différents, mais je n’ai pas non plus réalisé de test.)
Bonjour. Merci pour votre article. Après avoir fabriqué un bâti en bois, j’ai opté pour le complément Nikon ES1 – plus pratique – monté sur un Micro Nikkor 55 mm f3,5 et une bague PK13, le tout sur D700 ou D800. Mes résultats sont meilleurs que ceux que j’obtenais non sans difficultés avec un Scan dual Minolta. J’utilise la lumière du jour.
Je sais que l’on ne change pas ce qui marche 🙂 Mais en utilisant la lumière du jour, selon l’heure et la météo la colorimétrie change. Ca ne vous créée pas de problème?
Bonjour,
J’ai des milliers de diapos à scanner…
J’ai essayé avec un D750 la solution ES-1 et caméra control, mais je ne trouve pas de source de lumière avec un IRC correct(98) et le positionnement de ES-1 est sensible d’où une perte de définition et un cadrage délicat.
Que penser de la solution transfer-lab qui utilise la lumière d’un projo ?
Merci pour votre avis.
Bonjour,
Pour la source de lumière, le plus simple c’est probablement de fabriquer une table lumineuse en choisissant des tubes ou des Leds équilibrées pour la lumière du jour. Je l’ai fait dans le passé avec des tubes, je n’ai jamais utilisé de leds? Je ne sais pas si on en trouve d’occase.
je n’ai jamais essayé d’utiliser ES-1, donc je ne suis pas capable d’apprécier ce que vous qualifiez de cadrage délicat. La profondeur de champ au rapport 1/1 est bien entendu extrêmement réduite.
Je me demande si paradoxalement Camera Control ne serait pas une fausse bonne idée? En travaillant avec une colonne au-dessus d’une table lumineuse, la diapo étant positionnée dans un passe vue d’agrandisseur, et en refaisant le point en utilisant l’autofocus de l’appareil entre chaque dia, c’est probablement plus rapide qu’avec Camera Control. Ne serait-ce que parce que l’on ne regarde pas l’image. 🙂 Il n’est d’ailleurs pas nécessaire de la regarder. Vous avez trié avant les dias que vous voulez scanner. Vous avez fait des tests, l’exposition et la balance des blancs sont réglées manuellement pour être identiques sur toutes les dias; vous devez juste vérifier le positionnement de la dia.
En ce qui concerne l’utilisation de la lumière d’un projo, pourvu que son IRC soit bonne, parce que je suppose que vous réalisez vos prises de vue en Raw, la température de couleur de la lampe n’est pas un problème.
Par contre je ne sais pas comment transfer-lab utilise le projo. Photographier une image projetée dans une boite sur un mur ou sur un écran translucide suppose me semble-t-il une perte qualitative non négligeable. Mais je n’ai pas d’éléments de comparaison.
Ils utilisent des lampes et la diapo risque de bouger sous l’effet de la chaleur.
Je reviens du site de transfer-lab. Leur approche est bonne. (Lampe de faible puissance, diffuseur blanc, prise de vue directe de la dia) Cependant, sans test je ne peux en dire plus.